Jacques Chardonne avait 82 ans quand parurent, en 1966, Propos comme ça. Paré de la sensibilité "refroidie" de la vieillesse, armé de son oeil "sec et perçant", il se promène dans un siècle qu'il va quitter en paix avec lui-même. C'est une suite de portraits, de pensées et d'anecdotes dans la lignée de La Rochefoucauld ou La Bruyère. "En France, le style est à peu près fixé depuis trois siècles". La phrase maigre de Chardonne en fait l'héritier des moralistes du Grand Siècle. Avec elle, il se permet d'aligner l'amour, les femmes, la solitude et même l'histoire de France. Il en revient souvent à la littérature. Faulkner et ses verres de Pernod, Morand et ses "éclairs sur fond noir", Balzac et son côté faussaire génial apparaissent fugacement.En homme d'édition qui connaît le "personnel", il déplore l'inflation des titres et les jeunes auteurs publiés à l'abattage - rien n'a vraiment changé depuis les années 1960, c'est drôle et effrayant. Mais la hauteur n'est pas le dédain et Chardonne est bien trop élevé, bien trop désinvolte, pour seriner des leçons. Détaché, il rêve encore, ce qui donne de la sève à ces Propos. Encore vert et toujours souple, il se penche sur son travail d'écrivain (quarante ans de scrupuleuse distillation). "L'oeuvre est faite, quelle solitude. Cette oeuvre fut vraiment donnée". Chez Chardonne, tous les mots comptent, il faut entendre le don au sens de grâce, mais aussi de legs. Ainsi se révèle la secrète valeur testamentaire d'un ouvrage dont on a envie de citer chaque page.
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